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Sexisme au travail : ce que révèle le baromètre StOpE 2025 – Inès Dauvergne

Rédigé par Inès Dauvergne | 05/06/25

Quels sont les enseignements du baromètre StOpE 2025 ?

Les résultats du baromètre StOpE, édition 2025, sont enfin sortis et ont été présentés le 6 mai lors d’un événement organisé par l’AFMD chez L’Oréal, l’une des entreprises – avec Accor et EY – ayant lancé cette initiative en 2018 pour lutter contre le sexisme ordinaire en entreprise."

Le replay de cet évènement passionnant de 2 heures avec la restitution complète des résultats est disponible en accès gratuit sur le site de l’AFMD ici.

En attendant que vous trouviez le temps de le consulter – ou en guise de teasing – voici les 4 grands enseignements que l’équipe Me&YouToo retient de ces résultats. Pour rappel, le baromètre a été réalisé dans 19 entreprises signataires de l’initiative StOpE, avec près de 132 000 répondant·es, et complété par un benchmark national mené auprès de 1 000 personnes travaillant dans des entreprises de plus de 250 salarié·es.

💡 Enseignement n°1 – S’engager formellement contre le sexisme, ça fonctionne

S’engager formellement en tant qu’entreprise contre le sexisme permet de poser un cadre clair et d’initier des changements de comportements.

La comparaison des résultats entre les entreprises signataires de l’initiative StOpE et ceux du benchmark national est édifiante :

  • Dans les entreprises signataires, les femmes et les hommes perçoivent davantage l’engagement de leur employeur en faveur de la lutte contre le sexisme : +20 points par rapport au benchmark.
  • Ils et elles sont aussi mieux formé·es : 41 % ont été formé·es, contre 20 % en moyenne nationale, soit deux fois plus.
  • Les dispositifs internes sont mieux identifiés, en particulier par les hommes.

Côté impact :

  • 37 % des femmes et 43 % des hommes déclarent une baisse des agissements sexistes depuis 3 ans dans leur entreprise (vs 23 % et 34 % en moyenne nationale).
  • Près de 2 femmes sur 3 dans les entreprises signataires se sentent protégées par les dispositifs internes face aux violences sexistes et sexuelles, contre 58 % en moyenne nationale.

💡 Enseignement n°2 – L’engagement collectif favorise aussi la prise de conscience individuelle

Dans les entreprises signataires de l’initiative StOpE, 60 % des répondant·es estiment que chacun·e peut agir à son niveau contre le sexisme, soit +10 points par rapport à la moyenne nationale.

Les effets de cet engagement se traduisent aussi dans les comportements :

  • 1 personne sur 2, qu’elle soit femme ou homme, déclare être plus attentive aux comportements sexistes dans son environnement professionnel.
  • 43 % des hommes et 27 % des femmes affirment faire davantage attention à leurs propres comportements, soit 10 à 15 points de plus que la moyenne nationale.

💡 Enseignement n°3 – … mais l’engagement ne suffit pas à éradiquer le sexisme

Les agissements sexistes restent très largement présents, y compris dans les entreprises signataires de l’initiative StOpE :

  • 70 % des femmes déclarent avoir subi du sexisme ou une discrimination dans leur entreprise, dont 30 % récemment.
  • 40 % des femmes affirment en avoir été témoins récemment.

Fait marquant : ces agissements sont davantage perçus dans les entreprises engagées que dans la moyenne nationale. Cela ne signifie pas qu’il y en a plus, mais que les salarié·es y sont davantage sensibilisé·es, plus attentif·ves et mieux outillé·es pour les repérer.

Ces chiffres rappellent une réalité incontournable :
👉 L’engagement formel ne suffit pas. Il faut continuer à :

  • agir concrètement,
  • sanctionner les comportements sexistes remontés,
  • former et sensibiliser l’ensemble des équipes.

Or, à ce jour :

Cela pose la question d’une obligation de formation à la prévention du sexisme et du harcèlement sexuel, afin de ne pas se limiter à former uniquement les plus sensibilisé·es ou les volontaires.

💡 Enseignement n°4 – Une convergence des perceptions et une condamnation unanime du sexisme

Un consensus clair émerge aujourd’hui, tant chez les hommes que chez les femmes, sur les conséquences négatives du sexisme :
👉 9 salarié·es sur 10 estiment qu’il a un impact néfaste sur la confiance en soi, la santé mentale, l’engagement professionnel et qu’il génère de l’autocensure.

Les perceptions se rapprochent :

  • Les hommes identifient désormais presque autant que les femmes les formes les plus visibles du sexisme :
    • 74 % des femmes déclarent avoir été exposées à des plaisanteries sexistes,
    • 67 % des hommes disent en avoir été témoins, contre 37 % seulement il y a quelques années.
  • Un tiers des femmes a subi des commentaires sur son apparence ou sa tenue, et un tiers des hommes en a été témoin.

Cette évolution est confirmée par les chiffres du Haut Conseil à l’Égalité, qui soulignent une condamnation équivalente des situations de sexisme hostile et de violences sexuelles chez les femmes comme chez les hommes.

Enfin, plus de 80 % des répondant·es – hommes comme femmes – considèrent que :

  • l’implication des hommes est essentielle pour atteindre l’égalité,
  • et que les priorités d’action doivent être :
    • sanctionner davantage,
    • renforcer la formation,
    • et encourager la responsabilisation individuelle.

⚠️ … mais des écarts très importants persistent sur les formes insidieuses du sexisme

Si le niveau de sensibilisation des hommes et leur condamnation des formes les plus visibles et violentes du sexisme ont fortement progressé ces dernières années, des écarts très marqués demeurent entre les femmes et les hommes concernant les formes plus insidieuses, subtiles ou non verbales du sexisme.

Autrement dit, ce qui n’est pas explicitement dit ou montré – comme l’exclusion des décisions, le fait de couper la parole, le doute systématique sur les compétences, ou encore les freins à la progression de carrière liés à la parentalité – est encore moins perçu par les hommes que par les femmes.

👉 Ces décalages montrent que, malgré les avancées, les inégalités de genre persistent, notamment dans les mécanismes plus profonds, ancrés dans les normes sociales et les pratiques professionnelles quotidiennes.

 

⚠️ … mais les formes insidieuses de sexisme restent largement invisibilisées par une partie des hommes

Si les formes les plus évidentes du sexisme sont aujourd’hui mieux reconnues, les formes plus subtiles – souvent ancrées dans le quotidien professionnel – restent sous-estimées par les hommes :

  • 67 % des femmes déclarent avoir été victimes de sexisme en réunion (avis ignorés, interruptions, réappropriation de leurs idées...), contre seulement 45 % des hommes qui disent percevoir ces situations.
  • Les écarts de perception sur les inégalités liées à la rémunération, aux promotions, à l’autorité ou à la reconnaissance des compétences atteignent 20 à 30 points entre les femmes et les hommes.
  • 73 % des femmes estiment que le fait d’être mère freine leur carrière, contre 49 % des hommes.

Une divergence de perception encore plus marquée dans les entreprises engagées

Les écarts de perception entre les femmes et les hommes sur les inégalités sont encore plus importants dans les entreprises signataires de l’initiative StOpE que dans la moyenne nationale. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce phénomène :

Une tendance structurelle à la sous-estimation des inégalités par les hommes, notamment lorsque celles-ci sont insidieuses et ne les concernent pas directement. Ce biais d’invisibilisation se retrouve dans toutes les thématiques liées à la diversité :
→ Les personnes hétérosexuelles minimisent l’homophobie ordinaire,
→ Les personnes blanches perçoivent moins le racisme ordinaire,
→ Les personnes valides saisissent rarement la réalité des obstacles rencontrés par les personnes en situation de handicap.
🧩 Une confusion fréquente entre l’égalité de principe et l’égalité réelle, en particulier chez les hommes travaillant dans des entreprises engagées :
👉 Le fait que leur entreprise affiche un engagement formel est parfois interprété comme une preuve que les inégalités n’existent plus, ce qui peut mener à une minimisation des situations vécues par leurs collègues.
🎯 Une conscience accrue du sexisme chez les femmes, alimentée par :
    • une plus grande sensibilisation liée aux campagnes internes,
    • une visibilité accrue du sujet,
    • et un niveau d’exigence plus élevé vis-à-vis des comportements sexistes et des écarts persistants entre les discours et la réalité.

 

⚖️ Des perceptions divergentes… qui freinent les politiques d’égalité

👉 Pour de nombreux hommes, les inégalités de genre seraient aujourd’hui faibles ou résorbées, tandis que les femmes les perçoivent au contraire de façon plus aiguë.

Cette divergence a des conséquences directes :

  • 40 % des hommes estiment que la promotion de l’égalité se traduit désormais par une forme de discrimination positive à leur encontre.
  • 45 % des hommes se déclarent défavorables à l’application de quotas pour féminiser les postes à responsabilités à compétences égales,           
          contre 54 % des femmes qui y sont favorables.

Pour réduire ces écarts de perception et favoriser l’adhésion aux politiques d’égalité, les entreprises ont un rôle central à jouer. Elles peuvent notamment :

📢 Communiquer de manière transparente sur la réalité des inégalités, en s’appuyant sur des données objectives, pour faire converger les représentations.
📉 Assumer les progrès encore à accomplir, et ne pas se contenter de valoriser les réussites.
🚨Visibiliser les situations de sexisme remontées et les sanctions associées, afin de démontrer que l’engagement n’est pas seulement déclaratif.