Le sexisme et le harcèlement sexuel tout le monde en parle depuis plusieurs années. Certains esprits chagrins diront que c’est un phénomène d’actualité, que l’affaire Weinstein c'est déjà du passé et que le soufflet retombera. Vraiment ?
Loin d’être un effet de mode, nous assistons à un vrai changement dans notre société. La parole c’est (enfin) libérée et un certain nombre de situations hier tolérées ou subies sont aujourd'hui dénoncées.
Nous sortons collectivement du déni pour prendre conscience de l’ampleur du phénomène et de ses conséquences. Dans l’entreprise 74% des femmes cadres et 80% des femmes non cadres déclaraient avoir été régulièrement confrontés à du sexisme (étude BVA/CSEP 2013 et 2016). Sur les milliers de cas qui remontent sur les sites #balancetonporc ou paye ton taf, 20% concernent la sphère professionnelle. 50% des femmes et 40% des hommes entendent au travail des plaisanteries sexistes en France contre moins de 15% en Allemagne et en Italie (Etude à paraître de la fondation WIF).
Face à cela, l’entreprise peut soit être passive et gérer les cas qui remontent soit être proactive en abordant le sujet avec ses salariés et en priorité avec ses RH et managers. Mais dans quel but ?
1. Pour rappeler les obligations légales
Depuis 2015, les agissements sexistes sont condamnés par le Code du travail et l’entreprise doit en faire mention dans son règlement intérieur. Le harcèlement discriminatoire en raison du sexe est une forme de discrimination et le harcèlement sexuel punit par le code pénal.
2. Pour apaiser les tensions et éviter une guerre des sexes
L’objectif n’est pas d’opposer des hommes tous « agresseurs potentiels » à des femmes toutes « fragiles victimes », mais bien de garantir aux femmes ET aux hommes un cadre de travail respectueux de leurs droits et de leur intégrité et de prévenir des comportements dégradants, offensants ou humiliants.
3. Pour permettre des prises de conscience individuelles et collectives
Les hommes et les femmes dans l’entreprise ont tendance à avoir une vision diamétralement opposée des questions d’égalité. Si les 2/3 des femmes perçoivent des inégalités en termes de rémunération, d’évolution, d’accès aux responsabilités ; les 2/3 des hommes ont le sentiment que le genre n’a aucun impact dans l’entreprise (étude IMS, 2012). De même, beaucoup de managers paternalistes, familiers ou à l’humour un peu graveleux n’ont pas conscience que leurs comportements sont sexistes et mal vécus/perçus par une partie de leurs équipes. Parler du sujet de façon concrète ouvre certains chakras ou les chakras de certains…
4. Pour clarifier le sujet, savoir de quoi on parle pour mieux détecter et prévenir
Il ne faut pas confondre des notions qui ont des définitions et des cadres juridiques différents : sexisme, harcèlement discriminatoire, harcèlement sexuel, agression sexuelle. Bien définir permet de mieux prévenir et traiter. Mais cela permet aussi de sensibiliser à une forme particulièrement insidieuse du sexisme qu’est le sexisme ordinaire : la blagounette sur le physique, les « ma puce », « et si tu nous faisais un petit café », « avec un sourire et un décolleté comme ça, le client signe dans la minute ». Loin d’être anodin, plusieurs études ont montré que le sexisme ordinaire a un impact plus négatif sur la confiance en soi que le sexisme hostile.
5. Pour prévenir les RPS et améliorer la qualité de vie au travail
Le harcèlement sexuel mais aussi les agissements sexistes sont générateurs de souffrance au travail, de stress, de perte de confiance, de désengagement. Ils nuisent à la qualité de vie au travail et à la performance individuelle et collective.