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Acteurs et actrices en « Diversités, Équité & Inclusion » (DEI) depuis longtemps, nous sentons ces dernières années des vents contraires souffler sur nos sujets : fatigue, déni, scepticisme, fantasme de discrimination positive qui freinent les avancées. L’élection du nouveau président américain a ravivé l’idée que tout ce qui se passe aux Etats-Unis finit par déferler sur l’Europe. L’abandon récent par quelques grandes entreprises américaines de leur programme DEI a renforcé ce sentiment de menace. Pourtant, en France, de nombreuses entreprises ont, par la voix de leurs dirigeants, réaffirmé leur engagement. Alors, comment avancer de manière éclairée, sans militantisme ni naïveté, et sans céder à la peur ou aux influences extérieures ?
Non, ce qui se passe aux États-Unis n’a pas de raison logique ou systématique d’arriver en France, qu’on le souhaite ou non, car les histoires, les contextes et la culture ne sont pas les mêmes.
1. MULTICULTURALISME vs. UNIVERSALISME. Historiquement, les Etats-Unis ont abordé la question des diversités de façon multiculturelle voire communautaire. On laisse exister les communautés de façon identitaire et on l’assume. On dédie des programmes spécifiques, et on n’a aucun complexe à répertorier ou compter par exemple les minorités ethniques dans les entreprises. Cette démarche a notamment eu pour but de fixer des ambitions de représentativité des diversités (sous la forme de quotas ou d’objectifs non explicites) depuis les programmes d’Affirmative Actions des années 60. En France, notre approche universaliste, à laquelle on peut reprocher parfois une forme d’assimilation contrainte, repose sur un principe méritocratique qui, par exemple, refuse le comptage ethnique et fixe très peu d’objectifs quantitatifs. Ainsi, l’abandon de certaines actions dans les entreprises américaines concernent des modalités de gestion des diversités qui n’ont jamais existé en France, ce qui rend l’analogie incongrue.
2. CADRE LÉGAL. Les lois et les mesures en France sont surtout portées par une volonté de lutter contre toutes les discriminations, toutes les violences, toutes les formes de harcèlement quelles qu’en soient les formes et les cibles concernées. Mais ce cadre ne demande pas à l’entreprise de faire la promotion de tel ou tel groupe minoritaire. La question de l’orientation sexuelle par exemple est portée par la volonté de créer un environnement de travail non stigmatisant, dans lequel il est possible de la vivre « normalement », mais sans entretenir de militantisme au sein des entreprises.
3. NEUTRALITÉ : Les entreprises françaises se positionnent beaucoup moins que leurs homologues américaines sur les faits de société et sur des postures politiques voire idéologiques. Aux Etats-Unis, les entreprises sont largement prises à partie par l’opinion publique sur leurs positions sur tel ou tel phénomène de société et peuvent, si elles ne le font pas, faire l’objet de campagnes de boycott. En France, les entreprises se positionnent très peu sur des thèmes hors champ économique et les dirigeants Français ne prennent que très rarement la parole sur des sujets non directement liés à leurs activités. De fait, les sujets liés de près ou de loin aux enjeux de la diversité (Black Lives Matter, théories des genres, violences policières, wokisme, montée des extrêmes politiques et religieux, etc. ) ne se retrouvent pas forcément dans l’entreprise, ce qui rend notre approche du sujet assez éloignée des rituels états-uniens.
En France, les principes fondateurs des politiques DEI sont l’égalité de traitement et l’égalité des chances qui visent à corriger des inégalités subies plus particulièrement par les membres de certains groupes. Nous avons certes en France des objectifs sur deux critères : l’égalité Femmes/Hommes et le handicap. Mais ceux-ci restent régis par un principe légal d’équité de traitement, ce qui fait toute la différence. La discrimination positive est interdite en France. Une entreprise a le droit de mettre en place des actions positives négociées et ponctuelles, à condition de respecter la règle du « toutes choses égales par ailleurs ».
De même, la question des discriminations est souvent abordée en France de façon systémique sans culpabiliser directement les individus qui peuvent les produire : la discrimination est le plus souvent l’aboutissement d’un cumul de facteurs (poids des stéréotypes, impact du milieu social, inégalité dans l’accès à l’éducation, autocensure, méconnaissance légale,…). Là encore, comment faire une analogie sur des pratiques aussi différentes ?
Une fois ces différences posées, il est clair que nous devons garder la tête froide et continuer nos actions d’accompagnement sur les sujets DEI. Mais ne soyons pas pour autant naïfs, il est clair que le sujet est devenu clivant, et indépendamment de l’influence des Américains. Car nous sommes aussi largement capables en France, de lever des vents contraires ! Il est donc aussi nécessaire de nous questionner, de challenger nos pratiques et de proposer une façon appropriée à notre culture d’accompagner les entreprises sur ces sujets. Voici les quelques règles qui ont fait leurs preuves dans la pratique de diversité et inclusion à la française :
Face à un contexte parfois clivant, il est crucial de rester sereins mais déterminés. Les politiques DEI ne sont pas des effets de modes, mais correspondent à une évolution de notre société et constituent des leviers essentiels pour bâtir des organisations performantes, innovantes et attractives. En adaptant nos pratiques à notre culture et en agissant avec cohérence et conviction, nous avons l’opportunité de faire de l’environnement de travail un espace inclusif et équitable, au service de toutes et tous. Nous appelons tous les acteurs de l’écosystème : Etat, entreprises, associations, cabinets de conseil, monde académique à poursuivre leur engagement en faveur de la DEI. Agissons ensemble pour renforcer la diversité inclusive et universaliste à la française #FrenchTouchDEI